Des bâtiments moins énergivores grâce aux éléments multifonctionnels
Le parc immobilier est énergivore. En Suisse, près de la moitié de la consommation d’énergie provient des bâtiments, que cela soit pour leur construction ou leur exploitation, indique en 2021 l'Office fédéral de l’énergie. Les scientifiques travaillent ainsi sur plusieurs approches pour les rendre moins polluants. L’une d’entre elles est l’utilisation d’éléments de construction multifonctionnels.
«Dans les méthodes de construction actuelles, chaque élément occupe une seule fonction, indique Dolaana Khovalyg, professeure assistante tenure track à l’ENAC à la tête du Laboratoire d’ingénierie thermique de l’environnement construit (TEBEL), basé au Smart Living Lab. Ce mode de travail séquentiel est devenu obsolète: il rallonge les délais de construction, n’optimise pas l’espace, augmente la charge de travail et l’énergie consommée durant la construction». En surmontant ces obstacles, les modules multifonctionnels pourraient donc devenir une alternative, pour la chercheuse.
Des dalles à la fois éléments de structure et de chauffage
En collaboration avec le Laboratoire de construction en composites (CCLab) du professeur Thomas Keller, son équipe a démontré le potentiel de dalles en matériaux composites à base de fibres de verre. Ces matériaux étant particulièrement légers, solides et durables, ils conviennent parfaitement à la fabrication d’éléments structurels composés de cellules creuses, dont l’espace peut être exploité pour remplir une seconde fonction. Ici, les chercheurs ont fait circuler de l’eau dans les cellules, les transformant en chauffage au sol. «Il est tout à fait possible d’imaginer d’autres fonctions, comme d’utiliser les cellules pour cacher le câblage ou les conduits d’aération», souligne Dolaana Khovalyg. Ce composite pourra avec le béton, l’acier et le bois, devenir un des matériaux principaux dans la construction. Cette recherche a été présentée à la 8e conférence internationale sur la physique du bâtiment (IBPC 2021), qui s'est tenue du 25 au 27 août 2021, et a remporté le «Best Paper Award».
Augmenter l’efficacité en cas d’incendie
Les scientifiques ont également intégré les exigences de sécurité en cas d’incendie. Si un feu se produit, une surface spécifique du bâtiment doit en effet être sécurisée pour permettre l’évacuation de ses occupants. Or les matériaux composites offrent une moins bonne résistance au feu que d’autres matériaux. En cas d’incendie, la vitesse à laquelle circule l’eau serait alors accélérée dans l’espace en question, afin de pouvoir maintenir la température sous un certain seuil, et assurer la résistance de la surface pour permettre l’évacuation.
Pour démontrer la faisabilité de leur approche, les scientifiques ont utilisé un bâtiment déjà construit sur le site de l’EPFL. Ils ont isolé un étage et ont simulé l’utilisation de ces dalles pour la structure du sol. Ils ont étudié leur efficacité thermale, la résistance de la structure en cas d’incendie et leur capacité à remplir la fonction d’éléments structurels et d’éléments de construction. Ils ont non seulement démontré que ces critères étaient bien remplis, mais également que leur approche offrait la même efficacité qu’un chauffage au sol standard, tout en réduisant l’énergie consommée et en optimisant l’espace.