Une isolation thermique plus fine pour les bâtiments

Aeroskin Tech, une spin-off de l'ETH Zurich, développe une isolation thermique innovante qui utilise la technologie de l'aérogel pour isoler les bâtiments de manière plus efficace et plus durable. Cette nouvelle isolation a un effet d'économie d'énergie et est nettement plus fine que les matériaux conventionnels.
Daniel Sanz Pont avec un prototype de son isolation thermique. (Image : Michel Büchel / ETH Zurich)

Lorsque l'hiver arrive et que les températures chutent, nous pouvons soit enfiler des vêtements chauds, soit augmenter le chauffage et nous accommoder des coûts supplémentaires. Et si la solution pour une maison chaude et économe en énergie se trouvait dans les murs du bâtiment ? Plus l'isolation thermique extérieure des bâtiments est efficace, moins il faut d'énergie pour les chauffer à l'intérieur. C'est là qu'intervient Aeroskin Tech, une spin-off de l'ETH Zurich. L'entreprise développe un nouveau type d'isolation thermique qui isole deux fois mieux que les matériaux conventionnels. «Nous voulons fournir une isolation durable et efficace pour les bâtiments», explique Daniel Sanz Pont, fondateur d'Aeroskin Tech et chercheur scientifique principal dans le groupe dirigé par Robert Flatt, professeur de matériaux de construction à l'ETH Zurich.

Aeroskin Tech propose différentes solutions en fonction des besoins du bâtiment : par exemple, un enduit pulvérisé à ultra-haute performance qui est appliqué sur la façade, des panneaux isolants à ultra-haute performance qui peuvent être utilisés comme produits conventionnels ou pour une préfabrication sur mesure en combinaison avec la fabrication numérique et les scans de bâtiments en 3D. Ces éléments préfabriqués peuvent être rapidement fixés aux murs d'un bâtiment. Le matériau isolant offre une isolation deux fois à deux fois et demie supérieure à celle des produits conventionnels tels que les fibres de bois ou la laine de roche. La particularité des produits Aeroskin Tech est qu'une épaisseur d'environ 10 centimètres suffit déjà pour obtenir une isolation optimale du bâtiment. En comparaison, les panneaux de mousse rigide conventionnels ont une épaisseur allant jusqu'à 30 centimètres. «Les exigences varient selon qu'il s'agit d'une rénovation ou d'une nouvelle construction, et selon que cette dernière est construite selon les normes Minergie», explique Daniel Sanz Pont.

Le secret : un matériau issu de l'industrie aérospatiale

L'isolation thermique produite par la spin-off de l'ETH Zurich est basée sur un aérogel. Ces matériaux étaient à l'origine utilisés dans l'industrie aérospatiale comme isolants de haute performance pour l'électronique et d'autres composants sensibles. «Lorsque j'ai commencé à étudier les aérogels il y a une quinzaine d'années, ils n'étaient pas très courants. Mais j'ai rapidement compris leur potentiel pour des applications telles que l'isolation thermique des bâtiments», explique Daniel Sanz Pont, dont le doctorat porte sur les composites aérogels.

«Un aérogel est essentiellement un gel séché. Toutefois, contrairement aux gels normaux, il ne s'effondre pas lorsqu'il est séché, mais conserve son volume. Il possède une structure nanoporeuse», explique Daniel Sanz Pont. Cette structure est idéale pour l'isolation. Les matériaux isolants conventionnels sont également très poreux, constitués dans certains cas de 90% d'air, où la chaleur est principalement transmise par les collisions entre les molécules d'air. Dans une nanostructure, cependant, les pores sont si petits que les molécules d'air entrent en collision avec les parois des pores plus souvent qu'elles ne le font entre elles. «C'est ce qu'on appelle l'effet Knudsen», explique Daniel Sanz Pont. «C'est ce qui fait des aérogels les meilleurs isolants thermiques qui soient. Cela réduit considérablement le flux de chaleur de l'intérieur du bâtiment vers l'extérieur, par exemple. Dans un aérogel sec, les molécules d'air sont plus isolées les unes des autres. Grâce à cet effet, l'air chaud reste à l'intérieur de la maison et ne peut pas s'échapper à travers le matériau vers l'extérieur, car il en est empêché par l'effet de convection réduit à l'intérieur de l'aérogel.»

D'une niche à un marché mondial

Daniel Sanz Pont a grandi au Mexique mais est originaire d'Espagne. Il a étudié l'architecture, puis est retourné en Espagne, où il a poursuivi ses études et obtenu deux masters: l'un en physique du bâtiment et l'autre en gestion de la qualité et des risques. Au cours de ses études doctorales en science des matériaux à l'ETH Zurich, il s'est penché sur la question de savoir comment mélanger et traiter au mieux les aérogels de silice granulée. Le chercheur a rapidement reconnu leur potentiel pour l'industrie de la construction : «L'esprit d'entreprise est très répandu dans ma famille. Il m'a donc semblé évident de fonder une spin-off de l'ETH Zurich afin de pouvoir commercialiser mes recherches», explique Daniel Sanz Pont.

Jusqu'à présent, Aeroskin Tech a développé plusieurs prototypes d'isolation par pulvérisation, y compris un démonstrateur grandeur nature et des panneaux d'isolation, et a fait valider ces produits par des négociants et des entreprises de construction. L'octroi de subventions de projet et de financements publics, tels que ceux de la Fondation suisse pour le climat et du programme pilote et de démonstration de l'Office fédéral de l'énergie, a constitué un élément crucial du développement. La prochaine étape consiste à construire une usine pilote afin de passer à la production industrielle dans le but de commercialiser leurs produits d'ici un ou deux ans.

Le marché présente un énorme potentiel, avec des millions de mètres cubes de matériaux d'isolation utilisés chaque année. Dans ce contexte, la Suisse constitue un site de production très attractif : «Notre situation au cœur de l'Europe joue en notre faveur. De plus, en Suisse, il faut deux à trois fois plus de matériaux isolants que dans d'autres pays comme l'Espagne pour répondre aux exigences légales», explique Daniel Sanz Pont. C'est un bon point de départ pour s'implanter sur le marché.

Bientôt le prochain grand pas

Contrairement à d'autres spin-offs de l'ETH Zurich, qui sont généralement dirigées par deux ou plusieurs fondateurs, Daniel Sanz Pont a osé faire cavalier seul avec Aeroskin Tech. «Ma formation polyvalente me permet de réunir de nombreuses compétences différentes. J'ai également bénéficié d'un coaching et j'ai élargi ma formation et mon expérience en matière de gestion d'entreprise. Néanmoins, j'ai été soutenu par des professionnelles et professionnels exceptionnels de l'ETH Zurich pendant toutes ces années de développement», explique Daniel Sanz Pont, qui a constitué un réseau et travaille en étroite collaboration avec d'autres entreprises lorsqu'il a besoin d'une expertise particulière. Néanmoins, la décision de diriger seul l'entreprise est très stimulante : «J'aime vraiment les grands défis, mais je m'entoure aussi de mentors et mentores très expérimentées qui me permettent d'apprendre plus rapidement. C'est dans cet esprit que je veux préparer la prochaine étape avec soin. Aeroskin Tech est à la recherche d'investisseuses et investisseurs qui osent relever de grands défis afin que nous puissions commencer à produire à l'échelle industrielle», déclare Daniel Sanz Pont.

Son rôle au sein d'Aeroskin Tech, associé à son enseignement à l'ETH Zurich, semble impliquer de longues heures de travail. A-t-il encore le temps de s'adonner à ses loisirs ? «On pourrait penser que je vis et dors au bureau, mais ce n'est pas le cas. Il est important pour moi de trouver un bon équilibre», explique-t-il. «J'aime faire du sport, que ce soit du basket-ball, du football ou des sports d'hiver comme le snowboard. J'aime aussi passer du temps avec ma femme, faire des promenades à pied ou à vélo. Ce qui nous plaît le plus, c'est de voyager dans le monde entier». Ces activités aident Daniel Sanz Pont à recharger ses batteries afin qu'il puisse lancer la nouvelle génération d'isolation thermique avec Aeroskin Tech.