Un nouvel implant contrôle l'activité des neurones par la lumière
Grégoire Courtine n’hésite pas à parler de «révolution pour les neurosciences» lorsqu’il mentionne l’optogénétique: la possibilité de contrôler l’activité de neurones ciblés avec des ondes lumineuses. Aux côtés de Stéphanie Lacour, titulaire de la Chaire Fondation Bertarelli de technologie neuroprosthétique, le directeur de .NeuroRestore à l’EPFL précise: «Nous avons développé un outil qui nous permet de contrôler l’activité de n’importe quel neurone de la moelle épinière, et ainsi de pouvoir comprendre leur rôle dans le fonctionnement du système nerveux.»
La clé de cette percée: un nouvel implant développé par l’équipe de Stéphanie Lacour. «Nous avons réussi à encapsuler des diodes LED miniaturisées dans un implant souple suffisamment fin pour que l’on puisse l’appliquer juste à la surface la moelle épinière de souris, en le glissant sous les vertèbres, sur toute la longueur de leur section lombaire, explique-t-elle. Nous avons ensuite créé, avec nos collègues de l’ETH Zurich, un circuit électronique miniaturisé sans fil qui permet de sélectionner une ou plusieurs LEDs et de contrôler l’intensité et la durée des stimulations lumineuses avec une extrême précision. Enfin, nous avons fermé le circuit de manière à ce que le contrôle de ces impulsions lumineuses puisse être géré de façon naturelle, en réponse à l’activité musculaire ou tout autre signal physiologique, via un ‹System-on-Chip›󠅒 embarqué.» La programmation du protocole de photostimulation peut quant à elle être effectuée grâce à la technologie Bluetooth.
Un comportement aussi naturel que possible
Selon Grégoire Courtine, l’autonomie du dispositif est un atout crucial. «Cela nous affranchit des systèmes câblés que l’on utilisait jusque-là pour ce type de travaux. Nous pouvons désormais observer des souris évoluant sans aucune entrave et étudier le rôle des neurones dans la production de comportements complexes, comme la marche ou la nage, dans un contexte écologique.»
L’un des plus grands défis était de parvenir à délivrer des stimulations lumineuses qui pénètrent toute la profondeur de la moelle épinière, sans que celles-ci soient absorbées et réfléchies par les fibres nerveuses. Les scientifiques sont parvenus à transformer les LEDs afin qu’elles envoient de la lumière rouge, car celle-ci est bien moins réfléchie par les fibres nerveuses que la lumière bleue normalement émise par les LEDs.
Vers de nouvelles thérapies
Ces travaux, publiés dans Nature Biotechnology, sont en mesure de contribuer à l’essor thérapeutique de l’optogénétique. En effet, la stimulation ou l’inhibition de neurones précis de la moelle épinière par des impulsions lumineuses permettrait de minimiser la douleur, d’améliorer les fonctions autonomiques, voire de traiter la paralysie. Si la route est encore longue jusqu’à l’application clinique des travaux présentés aujourd’hui, les scientifiques se disent confiants quant à la possibilité de développer une version humaine de leur implant dans un proche avenir.