Augmenter l'efficacité de la photosynthèse artificielle
«La photosynthèse artificielle est le Graal de tous les chimistes», affirme Astrid Olaya, ingénieur chimiste à l’Institut des sciences et ingénierie chimiques (ISIC) de l’EPFL. «L’objectif est de capter la lumière du soleil, d’une part pour oxyder l’eau afin de produire de l’oxygène et des protons, et d’autre part pour réduire les protons en hydrogène ou le CO2 en produits chimiques et combustibles. C’est l’essence même d’une industrie chimique circulaire.»
Avec l’augmentation de la demande mondiale en énergie, nous avons besoin d’alternatives viables aux combustibles fossiles, dont les conséquences négatives sur l’environnement ne font aucun doute. L’une de ces alternatives est l’hydrogène, qui peut être utilisé dans des piles à combustible simples pour générer de l’énergie, en ne rejetant que de l’eau.
Une méthode pour produire de l’hydrogène est la «scission de l’eau», qui consiste à casser les molécules d’eau en hydrogène moléculaire et en oxygène. La photosynthèse artificielle consiste à absorber la lumière comme l’énergie nécessaire à la décomposition des molécules d’eau.
La conception classique d’un dispositif de photosynthèse artificielle est relativement simple: un colorant absorbant la lumière, appelé antenne, couplé à un semi-conducteur qui sépare les charges électriques (anode et cathode), et un électrocatalyseur qui entraîne la réaction de réduction-oxydation de l’eau.
Cependant, le processus reste trop lent pour être utilisable. L’oxydation de l’eau par la lumière visible (par exemple, la lumière du soleil) reste un obstacle à la photosynthèse artificielle, ce qui entrave le développement à grande échelle malgré plus d’un demi-siècle de recherche. «Le problème est qu’il est difficile de trouver des matériaux d’électrode présentant une grande stabilité chimique, des propriétés optoélectroniques appropriées et une efficacité catalytique élevée», confie Astrid Olaya.
Augmentation de l’efficacité grâce aux antennes
Travaillant au laboratoire d’Hubert Girault à l’EPFL, Astrid Olaya a mené une étude qui propose une nouvelle approche de la photosynthèse artificielle. Ses travaux ont été publiés dans le Journal of the American Chemical Society Gold (JACS Au).
«Dans cette étude, nous avons photo-oxydé l’eau avec une molécule organique simple, à savoir le tétrathiafulvalène (TTF)», explique Astrid Olaya. «Il a été démontré qu’une version saline du TTF peut s’auto-assembler en microrods qui font office d’antennes pour capter la lumière visible et de pompes à électrons pour oxyder l’eau en oxygène.» En général, il s’agit d’une réaction lente et en plusieurs étapes, mais l’empilement de molécules de sel de TTF peut «capturer» efficacement les quatre électrons nécessaires à l’oxydation d’une molécule d’eau et produire les protons nécessaiers à la production d’hydrogène.
Recours à l’huile
Les chercheuses et chercheurs ont également utilisé de l’eau dans une émulsion d’huile. «L’antenne TTF peut résider dans la phase huileuse proche de la phase aqueuse, vers qui sont extraits les protons produits par l’oxydation de l’eau», poursuit Astrid Olaya. «Comme dans la photosynthèse naturelle, le système biphasique permet une séparation efficace des réactifs et des produits.»
Le TTF est composé uniquement d’atomes de carbone, de soufre et d’hydrogène, qui sont tous facilement disponibles. Cela signifie que la nouvelle méthode est également durable car elle ne nécessite pas d’ions de métaux précieux tels que le platine ou l’iridium. «Ces travaux sont une nouvelle façon d’aborder la photosynthèse artificielle avec seulement quelques molécules organiques simples», conclut Astrid Olaya.