Mon jumeau numérique est-il malade?
Imaginez une copie numérique de votre corps. Une sorte de clone virtuel. Ce jumeau fictif détient toutes vos données médicales: âge, poids, taille, antécédents médicaux, rythme cardiaque, activité des organes, taux de cholestérol et patrimoine génétique, entre autres. Ces données sont transformées en formules mathématiques et introduites dans un système informatique géré par de l’intelligence artificielle et des algorithmes. Le jumeau numérique fonctionne en temps réel avec les données du patient, mais aussi avec celles de tous les autres jumeaux numériques existants.
Le but? Faire des prédictions médicales et fournir des traitements personnalisés. Les médecins pourront annoncer des cancers encore non déclarés et tester un traitement sur le clone digital, observer ses réactions puis prescrire le meilleur dosage à leurs patients. La communauté scientifique voit en cette future technologie une révolution où la bonne santé n’aurait plus de secrets. Des jumeaux numériques d’organes ont déjà été développés ou sont en cours de l’être. Celui du corps entier est attendu d’ici une quinzaine d’années. Mais derrière la prouesse scientifique, plusieurs acteurs s’interrogent sur l’aspect éthique de cette technologie, sur l’utilisation et la protection des données personnelles qui en découlent, notamment par des entreprises privées.
L’objet digitalisé
À la base, le jumeau numérique n’est pas seulement un concept médical : il se retrouve dans la conception d’objets en trois dimensions tels que les moteurs, les machines et même les villes. Les ingénieurs exploitent cette technologie pour conceptualiser la relation entre un objet physique et un modèle numérique connecté capable d’en prédire les comportements. En d’autres termes, le jumeau numérique est l’objet digitalisé. « La représentation se révèle efficace pour suivre le cycle de vie de l’objet, depuis sa production jusqu’à son utilisation et enfin sa destruction ou son recyclage », explique Frédéric Kaplan, directeur du Laboratoire d’humanités digitales de l’EPFL.
Repris en médecine, le jumeau numérique correspond à un modèle du patient basé sur l’intégration de données médicales et de leur historique. « Ceci permet en théorie une adaptation des traitements aux particularités de chaque patient. Dans certains cas, les thérapies pour le “patient moyen” ne sont pas appropriées à la spécificité du “patient réel” », précise le chercheur.
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