Même les arbres des forêts absorbent les nanoplastiques
Les plastiques, dérivés du pétrole, ne se décomposent que très lentement. Selon l’association allemande de protection de la nature, il faut 10 à 20 ans pour qu’un sac en plastique se dégrade en plein air, 200 ans pour une paille et 450 ans pour une bouteille de cette matière. Avec le temps, ces objets sont réduits en particules de plus en plus petites, définies comme microplastiques (moins de 5 mm) ou nanoplastiques (moins de 1000 nanomètres). Les nanoparticules, en particulier, représentent un danger pour les êtres vivants, car elles peuvent être absorbées par l’organisme. Elles s’accumulent ensuite dans les tissus et des indices montrent qu’elles pourraient entraîner des inflammations chroniques.
Pour les plantes, il n’existe que peu d’études sur l’absorption éventuelle de nanoplastiques par les racines, et jusqu’à présent aucune sur les arbres forestiers. Des recherches antérieures sur les oignons indiquent que les nanoplastiques endommagent les cellules des racines et peuvent ainsi inhiber leur croissance.
Transport dans la plante
Sous la direction d’Arthur Gessler du groupe Croissance de la forêt et climat du WSL, une équipe vient d’étudier l’absorption de nanoplastiques par trois essences courantes : le bouleau, l’épicéa et le chêne rouvre. Pour ce faire, les chercheurs ont marqué des nanoparticules de polystyrène de 28 nanomètres avec l’isotope de carbone 13C, puis les ont ajoutées à l’eau que recevaient les racines les plus basses des jeunes arbres.
Et effectivement, après un à quatre jours, l’isotope 13C a pu être détecté dans les tissus végétaux. C’est dans les racines au contact direct de l’eau contaminée qu’il s’est le plus accumulé. Mais de petites concentrations de nanoplastiques se sont également retrouvées dans les racines situées plus haut et dans les feuilles. Dans le cas du bouleau, dont la consommation d’eau est élevée, des quantités significatives de nanoplastiques se sont en outre déposées dans le tronc. Dans le rapport publié dans la revue spécialisée iForest, les chercheurs spéculent donc que le transport se fait par les voies de conduction de l’eau des plantes, le xylème.
Quel est le risque pour l’environnement ? Les quantités absorbées étaient très faibles, explique Arthur Gessler, qui ajoute « Mais si les arbres sont exposés à ces concentrations pendant des années, il faut s’attendre dans tous les cas à un transport significatif vers les feuilles, le tronc et les branches et par conséquent à une accumulation. » Les plantes constituant la base de la chaîne alimentaire, c’est donc par leur intermédiaire que le plastique pourrait se diffuser dans les écosystèmes forestiers. L’équipe poursuit maintenant ses expériences afin de déterminer si le nanoplastique perturbe la photosynthèse et, plus spécifiquement, la réaction photochimique des plantules, affectant ainsi leur nutrition. Pour Arthur Gessler, la seule solution au problème est d’interdire les emballages plastiques jetables partout où cela est possible et d’optimiser leur recyclage.