Une nouvelle approche pour le traitement de la trachéomalacie
Des chercheuses et chercheurs de l’EPFL ont accompli une avancée dans le traitement de la trachéomalacie. Cette affection se caractérise par l’affaiblissement du cartilage et des muscles de la trachée qui maintiennent normalement les voies respiratoires ouvertes pour permettre une bonne respiration. L’équipe, composée d’ingénieurs de l’EPFL et de spécialistes en chirurgie des voies aériennes pédiatriques du CHUV, a développé avec succès un nouveau patch d’hydrogel adhésif capable de corriger efficacement la trachéomalacie, ce qui laisse augurer de meilleures options de traitement pour cette pathologie complexe. La démonstration de faisabilité a été récemment publiée dans iScience.
La trachéomalacie est une affection congénitale relativement fréquente qui se traduit souvent par un affaissement excessif, parfois jusqu’à l’obstruction complète, des voies respiratoires chez les nouveau-nés et les nourrissons. Les méthodes de traitement actuelles, telles que la reconstruction de la trachée, la trachéoplastie et la pose d’une endoprothèse, entraînent souvent des lésions importantes et durables de cet organe vital. Pour pallier ces limites, les chercheuses et chercheurs et les chirurgiennes et chirurgiens se sont penchés sur le développement d’une nouvelle stratégie : un patch extraluminal d’hydrogel adhésif non invasif pour soutenir la trachée affaiblie.
L’hydrogel est un matériau souple biocompatible et biodégradable. Il est de plus en plus utilisé dans les applications biomédicales, mais c’est la première fois que des bioingénieurs explorent ses propriétés structurelles pour soulager la trachéomalacie. À l’aide de modèles numériques et animaux, Ece Uslu et Vijay Kumar Rana, ingénieurs du Laboratoire de Biomécanique Orthopédique (LBO), ont démontré qu’un patch d’hydrogel doté de propriétés mécaniques et d’une force d’adhérence adaptées pouvait maintenir efficacement la forme physiologique de la trachée. Pour y parvenir, de nouveaux hydrogels sont synthétisés afin de répondre aux défis posés par l’affaissement des voies respiratoires. Les chercheuses et chercheurs ont travaillé avec le Laboratoire d’hemodynamique et de technologie cardiovasculaire (LHTC), où Sokratis Anagnostopoulos a mené des études numériques essentielles.
Un patch d’hydrogel soutient les voies respiratoires affaiblies et corrige l’obstruction de 50%
« Cette recherche représente une avancée majeure dans la résolution des défis liés au traitement de la trachéomalacie », déclare le professeur Dominique Pioletti, responsable du LBO et principal chercheur du projet. « Le patch d’hydrogel adhésif que nous avons mis au point en collaboration avec le CHUV est très prometteur. Il pourrait apporter un soutien mécanique à la trachée et prévenir l’affaissement des voies respiratoires. »
Dans cette démonstration de faisabilité réussie, le nouveau patch d’hydrogel adhésif a montré une forte adhérence sur les surfaces trachéales humides et a soutenu structurellement une trachée complètement effondrée sous pression négative, augmentant son volume jusqu’à 50%. Ces résultats encourageants ouvrent la voie à l’utilisation potentielle d’hydrogels adhésifs comme nouvelle approche dans le traitement clinique de la trachéomalacie. « Nous sommes optimistes quant à cette démonstration de faisabilité, car l’augmentation de 50% de l’ouverture d’une trachée complètement affaissée est suffisante pour atténuer les symptômes graves de la trachéomalacie », confie le docteur Kishore Sandu, co-auteur de l’article et chef de l’unité de chirurgie des voies aériennes pédiatrique au CHUV.
Collaboration entre les ingénieurs de l’EPFL et les spécialistes en chirurgie des voies aériennes pédiatriques du CHUV
« C’était très intéressant de réunir des points de vue différents et de progresser vers une solution très attendue à un problème médical complexe », affirme le docteur François Gorostidi, co-auteur de l’article et chirurgien des voies aériennes pédiatriques au CHUV. La collaboration fructueuse entre les spécialistes en chirurgie et les ingénieurs pour ce projet dépendait de l’écoute attentive des besoins spécifiques de chacun en salle d’opération et au laboratoire. « Les ingénieurs et les spécialistes en chirurgie ne parlent pas toujours le même langage. Nous avons donc dû commencer par apprendre à travailler ensemble. Mais la mise au point d’une solution technique à une pathologie dont les options thérapeutiques sont limitées s’est révélée très prometteuse », explique Kishore Sandu.
La collaboration se poursuit, et les chercheuses et chercheurs ont tenu à souligner que le processus est extrêmement itératif. Il a fallu trois ans et des centaines de formulations de l’hydrogel pour obtenir ces résultats impressionnants. Les spécialistes en chirurgie et les ingénieurs n’abandonneront pas tant que leur solution à la trachéomalacie ne franchira pas les portes de la salle d’opération. Cela mettrait ainsi fin au problème souvent insoluble pour les médecins qui doivent dégager les voies respiratoires des nouveau-nés par des solutions invasives au risque d’entraîner des conséquences négatives inévitables.