Le blocage des sphingolipides empêche la dystrophie musculaire
Dans son étude, le laboratoire de Johan Auwerx de la Faculté des sciences de la vie de l’EPFL a établi la première connexion entre la dystrophie musculaire et les sphingolipides, un groupe de lipides bioactifs. Cette étude est publiée dans Science Advances.
Dystrophie musculaire
Le terme générique «dystrophie musculaire» regroupe des maladies dans lesquelles des mutations génétiques entraînent une faiblesse et une dégénérescence progressive des muscles squelettiques. La myopathie de Duchenne (Duchenne muscular dystrophy, DMD) représente près de la moitié des cas de dystrophie musculaire. La DMD est causée par une mutation du gène qui code pour la dystrophine, une protéine de soutien de la structure musculaire qui permet l’ancrage du cytosquelette des cellules musculaires à la face cytoplasmique du sarcolemme.
Les mutations de la dystrophine affectent différentes voies biologiques, ce qui provoque les symptômes caractéristiques de la myopathie de Duchenne: perte d’intégrité des membranes cellulaires, dérégulation de l’homéostasie calcique, inflammation chronique, fibrose et trouble du remodèlement tissulaire.
Lien avec les sphingolipides
Découverts en 1870 et nommés d’après le fameux Sphinx, les sphingolipides constituent un groupe de lipides bioactifs que l’on pense impliqués dans la signalisation cellulaire et, étonnamment, dans beaucoup de symptômes de la DMD. Les chercheurs se sont donc demandé si la synthèse des sphingolipides pouvait être altérée dans la DMD et, dans ce cas, si ces lipides pouvaient participer à la pathogenèse de la DMD. Pour répondre à cette question, les chercheurs ont étudié un modèle murin de dystrophie musculaire.
Tout d’abord, ils ont découvert que les souris atteintes de DMD présentaient une accumulation d’espèces intermédiaires de la biosynthèse des sphingolipides. Ce premier indice montrait donc que le métabolisme des sphingolipides était anormalement augmenté dans le contexte de la dystrophie musculaire.
Ensuite, les chercheurs ont utilisé un composé appelé «myriocine» pour bloquer l’une des enzymes clés de la voie de synthèse de novo des sphingolipides. Le blocage de la synthèse des sphingolipides a empêché la perte de fonction musculaire liée à la DMD chez les souris.
En poursuivant cette piste, les chercheurs ont constaté que la myriocine stabilisait le renouvellement du calcium musculaire et réversait la fibrose du diaphragme et du muscle cardiaque. Le blocage de la synthèse des sphingolipides a également réduit l’inflammation musculaire observée dans la DMD, notamment en promouvant un phénotype anti-inflammatoire des macrophages, un sous-type de cellule immunitaire.
«Notre étude identifie l’inhibition de la synthèse des sphingolipides, qui cible ainsi de multiples voies pathogéniques simultanément, comme une stratégie prometteuse pour le traitement des dystrophies musculaires», écrivent les auteurs.
Vieillissement musculaire et ARN
Cette étude succède à un autre article du groupe de Johan Auwerx sur le vieillissement musculaire, qui démontre les effets de l’exercice sur l’expression de gènes transcrits en ARN non codant dans les muscles squelettiques. Le vieillissement musculaire accéléré conduit à une maladie appelée sarcopénie, caractérisée par une perte importante de la masse musculaire et de la fonction musculaire chez les personnes âgées. Les chercheurs de l’EPFL ont découvert le long ARN non codant «CYTOR» et ont étudié son rôle dans les muscles sarcopéniques de rongeurs, de vers ainsi que dans des cellules humaines. Cette étude a été publiée dans Science Translational Medicine.